L'atelier à la résidence sera ouvert le dimanche 25 août à 16h30 Oscar Malessène et Emilie Picard, artistes sélectionnés pour une résidence en 2019 présenteront leur travail de peinture en cours. Le public pourra poser toutes les questions qu'il désire.

Oscar Malessène

INDOOR vauxois - I, 2018, acrylique sur porte isoplane, 93 x 204 cm
Le préalable d’une peinture d’Oscar Malessène est un dessin au crayon, une méditation géométrique dont les conclusions font l’objet d’un relevé millimétré. L’artiste l’a d’abord vécue comme un songe, dont il aurait sorti sa propre reine du Monde, son idée d’une surface élégante, distinguée, suffisamment digne pour porter la hauteur des vues et des sentiments que l’artiste accorde à la peinture. Les compositions d’Oscar Malessène se présentent comme les aplats de couleur qui composent une peinture abstraite, géométrique. Les couleurs sont choisies, élaborées avec soin, chaque ton est préparé, arrangé, cuisiné avec la minutie fébrile d’un alchimiste sur le point de voir ses recherches aboutir et la lumière révélée. La réalisation est fine, irréprochable, libre d’index comme de tout signe expressionniste. L’artisanat de la réalisation est entièrement soumis aux instructions tirées de la rêverie. Il n’y a pas d’écart de traduction, pas d’adaptation, seulement une stricte mise en forme. L’hypothèse de l’idée rigoureusement réifiée. Ces figures géométriques sont peintes avec la distance raisonnable qui permet de contenir et de malaxer le pathos dans le moment d’un travail aussi déterminé que sensible.
Oscar Malessène compose des peintures instables qui réalisent sur le plan du mur des oscillations entre la planéité et la représentation d’espaces. Au dynamisme des compositions angulaires s’ajoute un trouble perceptif, une disruption cognitive causée par la contradiction des stimuli qui affirment simultanément le plan et le relief. La peinture est soutenue dans sa dualité : image et fait, artistique et décorative, concept et percept, sensible et mentale.
Oscar Malessène n’a pas à choisir de camp : chaque peinture dont il est l’auteur est simultanément Jekyll et Hyde : le cas une étrangeté redoublée.
Sylvain Sorgato - octobre 2018
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Emilie Picard

Bâtons rompus, 2018, acrylique sur toile, 140 x 162 cm
Tout savoir est-il d’art et de saisissement ? Émilie Picard, diplômée des Beaux Arts de Marseille, a délaissé la « logique plastique » de la figure humaine, présente dans ses premières oeuvres, pour construire des images mentales, déroulant des arrières-mondes et des entropies à l’oeuvre comme pour signifier que toute histoire, fût-ce celle de l’art, est une expérience de finitude et de passage. Leur poétique interroge les notions de décor, de leurre, de rebut ou de faux-semblants en d’intrigants drapés de pierre ou de saisissantes alliances tirant la leçon de ce que l’art a toujours tenté de « signifier » - ou de ce à quoi il a toujours tenté de répondre : « Je recompose des univers proches de la mise en scène de théâtre. J’y intègre des architectures factices, précaires, maquettes illusoires faites de cartons, de brindilles, de déchets. Dans l’été à l’ombre, la structure en bois évoque tout à la fois la charpente d’une cabane et la structure même du châssis du tableau. J’introduis dans mes toiles des citations d’autres peintures comme celles des fresques écaillées de la Villa Livia, au nord de Rome. Ces trompe-l’oeil révèlent par leur dégradation leur nature illusoire, elles nous parviennent tronquées, lacunaires et activent l’imaginaire. Mes drapés de pierre font référence aux paysages de Giotto. Il les traitait dans ses fresques comme des décors miniatures, le rapport d’échelle avec les personnages les rendait anecdotiques, j’ai choisi d’en faire les sujets de mes toiles. J’ai toujours en tête l’idée qu’une peinture se fait et se défait, la décrépitude des fresques antiques nous le rappelle, leur dégradation fait partie intégrante de mes peintures. J’aime interroger cet art en voie de disparition en ses vestiges. » En somme, faire image de vestiges et tisser des correspondances subtiles en manière d’inquiétante étrangeté entre drapés et rigidité du minéral, entre rebuts de formes et rébus naturels - entre objets s’effritant ou formes en voie d’émergence. Dans ses toiles, « ce qui reste de l’être humain » est abordé par une dynamique constituante comme avatar, reliquat, masque tombé ou marionnette - comme l’oiseau dans Pic et pêches n’est qu’artifice, si volatil et si présent en son instrumentalité d’oiseau-leurre moqueur... “ La peinture n’est qu’un leurre : il est nécessaire de partir de l’illusion. ” « Ce qu’il reste de l’humain » est de l’ordre du domestique - à l’origine, il y a eu un geste ou cet acte pur, révélateur de l’autre dans l’image... Alors... faire image de l’ombre et de la lumière? « Quantitativement, l’ombre est peu présente dans mes toiles, mais elle révèle la multiplicité des sources de lumières, comme sur une scène de théâtre. La lumière provient aussi du tableau lui même, par le blanc laissé réserve qui éclaire chaque éléments en les détourant. » Depuis des millénaires, le patient travail imageant de l’homo monstrans s’est toujours attelé à la même affaire - celle de la mise en visibilité du monde sensible et de son ombre portée dans la multiplicité des sens ainsi que le rappelle l’éclairant propos de toiles d’Émilie Picard.
Émilie Picard, vestiges et vertiges de l’art.
Michel Loetscher, 2018
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